dimanche 27 février 2011

Saturday the 14th


Fiche du film :
Réalisateur : Howard R. Cohen
Scénariste : Howard R. Cohen et Jeff Begun
Année : 1981
Genre : Comédie
Acteurs principaux : Richard Benjamin, Paula Prentiss, Jeffrey Tambor, Kevin Brando, Kari Michaelson, Severn Darden
Résumé : Une famille vient d'acquérir une maison par un proche décédé et y emménagent de suite, sans prêter attention à la rumeur d'une malédiction planant sur la demeure, à en croire le notaire juste avant qu'il ne décède subitement. Bien que les parents ne remarquent rien, les enfants vont découvrir que leur nouvelle demeure est, effectivement, étrange et menaçante.

Avis sur le film :
Pour le scénariste de thrillers et de films d'épouvante Howard R. Cohen, Saturday the 14th est une première réalisation de pure comédie. Le titre fait clairement référence à Vendredi 13 distribué par Paramount un an plus tôt, maison de production qui en 1981 sort également Student bodies. Le film dont il est question ici, projeté en salles la même année dès le 30 octobre, n'a pourtant aucun lien avec le précédent, puisque nous le devons à la société New World, et également parce qu'il ne tisse aucun lien avec le fameux slasher mettant en scène Jason Voorhees. Il s'agit essentiellement d'un melting pot réunissant divers monstres en latex et un bon nombre de figures des classiques du film d'horreur d'Universal des années 30.


Le générique s'ouvre sur un dessin médiocrement animé qui inquiète de suite sur la tournure que va prendre le film, mais qui sert en définitive à être surpris, par rapport aux faibles attentes suscitées. Bien moins reconnu et apprécié que Student bodies, Saturday the 14th développe pourtant un humour qui, en comparaison, est plus digeste, bien que peu original.
Les premières plaisanteries suivent l'apparition du vampire Waldemar, un méchant anormal qui dit l'inverse de ce qui serait naturel ou qui joue sur le double sens des mots pour détourner discrètement des expressions à l'insu de son interlocutrice appartenant au monde des vivants. Ce procédé est typique, mais toujours efficace puisqu'il se base en grande partie sur l'inattendu, déclinable de nombreuses façons.
Mais surtout, l'humour n'est pas insistant ni placé de force. Les scénaristes ont pu imaginer quelques blagues sur le cinéma d'épouvante, mais la moitié du temps le contexte horrifique ne sert que de toile de fond pour des plaisanteries qui n'y sont pas directement liés. Le film penche vers une certaine simplicité humoristique, les gags sont dédramatisés et ne se font pas remarquer, comme lorsque la mère époussette un crâne dans son placard nouvellement acquis comme si de rien n'était, ce qui donne des scènes comiques moins prétentieuses, et ainsi plus propres à faire rire. Le même effet est produit par les acteurs qui jouent des scènes de comédie sans l'interprétation caricaturale habituel.


Inévitablement, certains gags tombent à l'eau, mais par le ton adopté par le film, ils ne s'apparentent pas à un échec. De plus, la soulageante absence de lourdeur fait que les ratés n'ont pas l'inconvénient d'agacer, mais laissent seulement un sentiment neutre. Il est dès lors tout naturel de pardonner aux scénaristes les passages à vide de leur travail, par ailleurs souvent absurde mais ni poussif, ni trop idiot.
Il y a des maladresses par moments, preuves d'un petit budget, à voir ce monstre balourd dans la chambre, visiblement un homme en costume bon marché avec une difficulté pour se mouvoir, ou ces fleurs qui se décomposent en stop-motion. Ces scènes ne sont pas totalement abouties, mais ont le mérite d'avoir essayé.
Saturday the 14th n'est pas en manque de surprises : les flashs magiques lumineux fleurent bon les 80's, les effets spéciaux sont surprenamment corrects, et surgissent des allusions amusantes à Rosemary's baby, Les dents de la mer, La petite boutique des horreurs ou, évidemment, Dracula, hilarantes à condition de connaître un tant soit peu ces références cinématographiques.


Saturday the 14th voit son taux de drôleries baisser sur la fin, mais globalement il s'agit d'un agréable, quoiqu'étrange, mélange des genres, introduisant un peu de gore dans ce qui semble être un divertissement familial avec son happy ending mielleux, et rendant hommage à des classiques en les alliant à une ambiance bon enfant. Cependant, la connaissance du genre de la part des scénaristes et du réalisateur, et leur capacité à gérer l'humour, en font un long-métrage très plaisant quoiqu'inégal.
Par rapport à la plupart des parodies, ce film sait se différencier par un genre de gags différent, qui ne rejoint pas la lourdeur que l'on trouve ailleurs, à l'exception d'une unique scène où une femme s'enfuit en hurlant comme une furie et qui rappelle le caractère trop primaire des blagues comme celles d'un Student bodies par exemple, mais qui peut servir à séparer plus clairement le sens de l'humour de cette réalisation d'Howard R. Cohen du reste.
Les manques de moyens et les gaucheries sont visibles, mais participent plus ou moins involontairement à apporter certaines qualités -comme avec ces acteurs qui sont fortement comiques même s'ils ne font pas d'efforts pour- et font également de ce film une parodie avec des situations qui se prêtent à la comédie, mais sans les traits grossiers qui la caractérisent généralement.

Bande-annonce VO :

vendredi 25 février 2011

Student bodies


Fiche du film :
Réalisateurs : Mickey Rose et Michael Ritchie
Scénariste : Mickey Rose
Année : 1981
Genre : Comédie
Acteurs principaux : Kristen Riter, Matthew Goldsby, Jerry Belson, The Stick
Résumé : Un tueur qui se fait appeler "The breather" à cause de son asthme menace les élèves d'un lycée en assassinant tous ceux ayant des relations sexuelles.

Avis sur le film :
A l'orée des années 80, alors que les slashers se développaient en grand nombre, les premières parodies du genre commencèrent à poindre elles aussi leur nez. L'une des premières fut Student bodies en 1981, produite par Paramount, qui peut figurer comme le croisement entre les routes de deux films de la même maison de production sortis un an auparavant : la comédie Y a-t-il un pilote dans l'avion ?, et le premier opus de ce qui devint une grande saga d'horreur, Vendredi 13. Cependant, si la société a financé cette réalisaiton de Michael Ritchie, c'est dans des conditions spéciales, cherchant avant tout à sortir beaucoup de films qui ne soient pas liés à la Writer's guild of America tandis que des scénaristes étaient en grève, ce qui poussa le réalisateur à dissimuler son nom au générique pour ne pas s'attirer les foudres du syndicat.


Aujourd'hui la référence dans le genre de la parodie reste le trio formé par Jim Abrahams et les frères Zucker, souvent imités sans qu'aucun n'ait pu égaler les bases posées avec Hamburger film sandwich mais surtout Y a-t-il un pilote dans l'avion ?. Avec ce dernier film, bien qu'en 1981 il soit trop tôt pour y voir une influence, Student bodies a pour point commun involontaire un début difficilement comique. Ce qui le différencie, c'est qu'il ne tend pas à provoquer l'hilarité par la suite.
Il y a beaucoup à dire et à critiquer concernant le cinéma d'horreur, le scénariste Mickey Rose semble l'avoir compris, mais ce qui aurait pu être pertinent est entravé par une envie de placer autant de bouffonneries que possible, à tout instant. N'importe quelle occasion est bonne à saisir, et avant même le début du récit les blagues poussives pleuvent déjà par des titres à l'écran qui sur-exploitent un même gag à la base lui-même faible comme si, ne pouvant choisir la date de début entre "Halloween", "L'anniversaire de Jamie Lee Curtis" ou "Vendredi 13" quel est le plus -dans une certaine limite- amusant, il a été choisi de tout mettre à la fois.
Rares sont les passages qui décrochent un sourire, mais ils sont aussi entrecoupés de plaisanteries forcées qui non seulement ne sont pas drôles, mais amènent peu à peu l'agacement. Le scénario cède rapidement aux facilités les plus piteusement basiques, par l'usage classique du pet, que ce soit sur un chien ou un cadavre. Et encore, il y a ces moments tout autant dénués de sens que d'humour, telle cette scène déconcertante du bout de poulet ramassé, rattaché au pilon auquel il appartient par un élastique, puis remis dans le réfrigérateur.


La parodie, par définition, fait dans l'excès, mais très souvent les films qui s'y rapportent tombent dans la lourdeur, et c'est le cas de Student bodies. Il y a de bonnes idées au niveau de la musique et du montage pour s'acharner exagérément sur une montée d'escalier interminable afin que la ponctuation dramatique devienne humoristique, ou pour un meurtre dont le découpage des plans est prolongé au delà de la logique. Mais dans ce dernier cas le film a du mal à se positionner assez clairement dans la dérision et, ici, une plus grande insistance aurait été nécessaire pour ne pas tant faire hésiter entre l'impression d'un mauvais travail de post-production et un défaut voulu, surtout que les deux sont difficiles à démêler à cause de la bizarrerie inquiétante de ce qui a précédé dans le long-métrage.
Quand le film attaque le slasher de façon justifiée par rapport aux clichés du genre, c'est en tournant principalement autour du principe de "sex kills", que l'on peut tirer de sagas comme Vendredi 13 ou Halloween, ou en pastichant la figure du tueur suivi en vue subjective et à la respiration trop appuyée pour appartenir à quelqu'un qui ne soit pas détraqué psychologiquement. Ce dernier point s'appuye sur une réalité mais occupe trop de place dans le long-métrage alors que cet effet grandement appuyé est agaçant dès le début.
Arrivé à un certain point, il faut sortir du film en lui-même, notamment par l'introduction d'un censeur expliquant comment être classifié "R" pour attirer un plus large public, afin de faire rire. C'est aussi le cas de la fin, très étrange et visiblement juste une façon de conclure lorsque le film de plus en plus tiré par les cheveux se retrouve dans une impasse, mais assez agréable par le simple fait qu'elle change du reste.


Student bodies ne parvient pas à se dépêtrer de gags lourds, qui camouflent l'histoire avant qu'elle n'apparaisse clairement vingt minutes avant le générique, lorsque l'on tente de nous faire nous soucier des personnages alors qu'il est trop tard, n'ayant jusque là pas remarqué qu'ils avaient une fonction autre que d'amener des sottises qui s'enchaînent beaucoup trop pour être de qualité.
Cet essai dans la caricature du slasher est tout de même loin des horreurs que nous servent de nos jours des personnes telles que Friedberg et Seltzer, mais malgré sa place dans l'histoire de la parodie il n'a pas de quoi marquer les esprits, que ce soit en bien ou en mal, si ce n'est par la présence du mystérieux "The Stick". Ce comédien aux membres élastiques n'est apparu nulle part ailleurs au cinéma ; ici dans son rôle de Melvin le concierge il est une curiosité suffisante pour avoir inscrit le seul film de sa carrière dans la mémoire du public et, pour certains, est leur seule raison pour avoir terminé de regarder Student bodies. En dehors de son nom de scène, son identité est restée inconnue des années durant, jusqu'à ce qu'en 2010 il semblerait avoir été reconnu comme étant Patrick Varnell, décédé depuis une quinzaine d'années.

Bande-annonce VO :

mardi 22 février 2011

127 heures


Fiche du film :
Réalisateur : Danny Boyle
Scénaristes : Danny Boyle, Simon Beaufoy
Année : 2010
Genre : Drame
Acteur principal : James Franco
Résumé : Randonneur et escaladeur chevronné, Aron Ralston est tellement sûr de lui qu'il ne prévient plus personne du lieu de ses escapades en terrain désertique. C'est, il s'en rend compte, une erreur, et le regrette amèrement le jour où il tombe dans un fossé et qu'un rocher écrase sa main, l'immobilisant totalement.

Avis sur le film :
En avril 2003, alors qu'Aron Ralston, jeune homme de 27 ans, parcourait le Blue John Canyon, il tomba dans une crevasse où un roc écrasa sa main. Il y resta cinq jours, dans l'impossibilité de se débloquer, et finit déshydraté et pris de délires avant de devoir s'amputer, sachant que personne ne viendrait le secourir.
Depuis il écrivit Plus fort qu'un roc, un ouvrage retranscrivant son calvaire, best-seller dans de nombreux pays et base du scénario de Danny Boyle, qui voulait en faire un film depuis déjà quatre ans.


Sans nécessairement avoir retenu le nom de la personne, l'histoire de cet homme qui s'est coupé la main afin de rester en vie est de notoriété publique, ainsi comment faire un long-métrage à partir de ce sujet, en sachant même que le principal protagoniste a écrit sur ce qui lui était arrivé ?
Le film choisit déjà de faire ce qu'il y a de plus simple pour rajouter du temps de pellicule, à savoir montrer en partie le personnage avant l'accident. Si la préparation du casse-cou est banale, et si le récit est déjà connu, Danny Boyle apporte sa réalisation qui change la donne. Pour quelque chose de simple sur le papier, à savoir un homme qui prépare ses affaires et conduit jusqu'à son terrain de jeu géant, nous avons des écrans partagés en trois, une musique très rythmée, et une stylisation de l'image avec par exemple ces traînées de lumière formées par des véhicules sur l'autoroute. Ces effets peuvent paraître gratuits, mais tel que nous le découvrons peu à peu, représentent le personnage de James Franco lui-même. Sportif solitaire et amoureux de la nature, il est néanmoins cool et profite de sa connexion avec la planète Terre pour bluffer les filles qu'il rencontre en chemin. La joie de vivre du personnage, transmise par sa bonne humeur et l'énergie qui se dégage des premières scènes, évite de s'ennuyer durant les passages de randonnée ou de parcours cycliste là où d'autres cinéastes auraient adopté la lenteur pour insister sur la simplicité de la beauté du paysage, ici aussi mis en avant quoi qu'il en soit, par des split-screens et des plans larges succincts mais qui suffisent à aimer momentanément ce panorama autant que ce doit être le cas d'Aron.


L'accident arrive tout de même assez rapidement, de quoi se demander à nouveau comment le reste du film peut se baser sur un randonneur coincé au fond d'un gouffre pendant des jours.
La plupart des spectateurs savent ce qu'il s'est passé au final, sauf que, à l'exception de ceux ayant lu le livre, le film se montre intéressant en montrant ce qui est arrivé entre la chute et l'amputation 127 heures plus tard.
C'est au fil des efforts, des espoirs, des déceptions d'Aron que l'on progresse, mais cela ne suffit pas pour le cinéaste. Il y a donc quelques soulagements comiques, mais plus tard pour relâcher la pression et sortir de cet endroit très étroit, le film nous renvoie de temps à autre à des flashbacks et fait intervenir quelques hallucinations, dont une complètement inutile et déplacée par son caractère clairement comique, qui inclue une poupée gonflable de Scoubidou. Il s'agit de la représentation de l'espace mental et de la vision altérée par les accès de folie de la personne réelle, mais dans une oeuvre fictive cela paraît correspondre à des procédés trop faciles destinés à éviter la monotonie.
Et pourtant il n'y en aurait pas réellement eu besoin, car interviennent déjà dans le fossé suffisamment de micro-évènements, puisqu'ils sont arrivés dans la réalité.
Les retours en arrière ne sont pas tellement utiles, ils ne servent qu'à marquer une pause ou rallonger le temps du film, et en apprennent peu sur le personnage, sur lequel il n'y a par ailleurs pas besoin d'en savoir tant. Peu nous importe sa petite amie passée qui n'intervient pas avant la seconde moitié du film, ou la soeur dont on apprend trente minutes avant la fin qu'elle va se marier, puisque dans l'instant nous sommes déjà en empathie assez forte avec le personnage. Ce n'est pas tant pour lui que l'on souffre, mais les situations dans lequelles il se retrouve suffisent à retenir son souffle dans des moments de problèmes subsidiaires, dont l'issue n'est pas connue de tous même si c'est le cas du fin mot de l'histoire. La perte du couteau ou la réserve d'eau qui se vide ne changent pas l'issue globale, mais peut arranger plus ou moins favorablement ce qu'il se passe entretemps, et là est l'enjeu dramatique de ces scènes.


Si le début en plein air nous faisait admirer la nature, le traitement est différent à l'intérieur de la crevasse, bien qu'il rejoigne ce lien entre l'humain et la nature présent auparavant avec ce James Franco traînant sa main le long de la roche, puisque les sensations prennent une place particulière dans le film. En dehors de contraintes spatiales, puisque toutes les scènes dans l'interstice rocheux n'ont pas été tournées en décor naturel à en croire certains positionnements de la caméra, l'image est tout de même resserrée autour du visage et des objets. La sensation d'enfermement est renforcée, et à l'écran se recrée le nouvel espace de vie d'Aron, où tout est beaucoup plus proche, à cause du resserrement, et où le tactile a une plus grande importance. Les bruits de bouche asséchée sont amplifiés, la vue des objets et des liquides va au coeur du sujet : la caméra plonge dans la bouteille, ou elle rentre à l'intérieur de la montre.
A vivre si longtemps dans ce lieu, le personnage et le spectateur ont de nouveaux repères, que ce soit le corbeau qui passe chaque jour à la même heure ou les 15mn de soleil quotidiennes, qui dans ce dernier cas poussent le personnage à exposer autant que possibles ses membres à la lumière. C'est là que s'explique toute cette perception soulignée, puisque les sens sont aux aguets, l'homme essayant de profiter autant que possible du peu qu'il a, et c'est ainsi que chaque bruit infime est accentué, et que des objets prennent une dimension hyperbolique.


James Franco a peu de répliques mais, justement probablement parce que son jeu ne se base pas sur les paroles, livre une sacrée performance. Drôle parfois sans être trop macabre, comme peut l'être la scène de sitcom dans Tueurs nés dont l'équivalent ici est l'imitation par Aron d'un talk-show, et tragique la plupart du temps, exprimant la détresse d'un homme dans une situation pareille.
La fameuse scène d'amputation en elle-même, quoiqu'intense, est courte, probablement de par l'intérêt du réalisateur qui se porte plus sur la durée générale que sur cet évènement bien que ce soit un pivot de l'intrigue. Par son arrivée abrupte, ce passage est aussi significatif d'un état du personnage dans lequel il agit en se disant qu'il est temps sans réellement y réfléchir et avoir l'occasion de se rétracter. C'est certainement ce qui rend le caractère trash de ce moment encore plus percutant, et heureusement le film n'a pas cherché à ménager le public, présentant à d'autres instants des éléments incorrects que d'autres cinéastes auraient coupé, pour ne pas avoir à montrer le personnage urinant ou hésitant à se masturber.
127 heures tombe effectivement dans quelques facilités, mais celles-ci correspondent à la réalité de ce qu'il s'est passé, ne dérangent pas, et son mineures dans le film, qui excepté cela est bien réalisé et a su traiter correctement son sujet sans se calquer sur une narration propre à un livre, ni ennuyer.

Bande-annonce VOST :


Message de la grand-mère de James Franco :

dimanche 20 février 2011

Le discours d'un roi


Fiche du film :
Réalisateur : Tom Hooper
Scénariste : David Seidler
Année : 2010
Genre : Drame
Acteurs principaux : Colin Firth, Geoffrey Rush, Helena Bonham Carter
Résumé : Incapable de déclamer un discours sans bégayer, le duc de York, Albert Frederick Arthur George, ne se voit pas accepter la couronne royale à la succession de son père et avec elle le sort d'une Angleterre à la veille de la crise. Tous les médecins anoblis ont été consultés pour remédier à son défaut d'élocution, sans résultats. En dernier recours, sa femme fait appel à un orthophoniste aux méthodes moins conventionnelles.

Avis sur le film :
Si l'on retient généralement de la seconde guerre mondiale Hitler, le général De Gaulle dans l'héxagone, et Churchill éventuellement de l'autre côté de la Manche, le scénariste de Tucker, David Seidler, s'est lui intéressé au roi Georges VI, beaucoup moins connu. Lui-même souffrant de bégaiement lors de son enfance, il se passionna pour ce souverain qui réussit à surmonter son problème et qui put donner des discours radio-diffusés, et ce fut même le premier sujet sur lequel il voulut écrire un script. Cela explique que l'on fasse un film de deux heures, qui débouche sur un discours qui n'a pas même marqué l'Histoire, un évènement mineur parmi tant d'autres qui n'auraient pas nécessairement besoin que l'on s'attarde dessus, s'il n'y avait pas la fascination particulière d'un auteur pour en faire un sujet digne d'intérêt.


Ce simple discours qui a demandé tant d'efforts insoupçonnés à une seule personne peut en définitive, dans le contexte de conflit international, représenter l'un de ces évènements relativement insignifiants, comme une goutte d'encre sur l'infini parchemin narrant l'Histoire de l'humanité, un petit rien parmi d'autres mais qui participe à un grand tout d'une importance capitale qui dans le cas présent serait l'annonce de la guerre. Quoi qu'il en soit, le traitement cinématographique suffit à donner du poids à ce fameux discours et au problème de bégaiement qui le précède. Le travail de recherche en profondeur de David Seidler se ressent, puisqu'à partir du thème du défaut d'élocution la caractérisation du personnage principal et de son souci se fait avec une précision croissante et avec subtilité, lors d'analyses sous-jacentes entre l'orthophoniste et son patient au cours de dialogues très bien élaborés quant à leur enchaînement et leur progression scénaristique qui les fait paraître naturels. Sans jamais plonger au coeur du problème de prononciation pour y remédier définitivement, ce qui n'arrivera pas même à la fin du récit, Le discours d'un roi distribue ce qu'il faut d'informations au public en même temps qu'il fait passer des émotions qui peuvent varier au cours d'un unique échange verbal ; régulièrement du rire mais la plupart du temps de l'attristement et de l'inquiétude quant au sort du personnage principal.


Voir ce roi devoir réciter ses discours alors qu'il n'y arrive pas, pas même capable de discuter sans être bloqué ou de raconter une histoire à ses filles correctement -ce qui fait par ailleurs partie des moments de parfaite caractérisation du personnage- rien que cela suffit à nous placer dans le même malaise que lui. Chaque raclement de gorge, chaque mot saccadé durant une déclaration officielle est amplifié par le micro ; mais heureusement pour le spectateur son calvaire se termine quand le montage coupe, alors qu'il ne s'agit pour le roi que le début de son cauchemar. Cet inconfort se poursuit néanmoins tout au long du film, et crée du stress à voir le personnage ne pas progresser. De plus la mise en scène insiste beaucoup sur l'oppression, empêchant au début une tranquilité par le cadre serrant le Duc de York entre le coin de l'image et celui du fauteuil où il est installé. Ce choix de plan est très insistant, mais ne peut que déranger par son étrangeté visuelle et par la clareté de ses intentions.
Le film brille par sa construction narrative et quelques bonnes idées de montage dont alternance au cours d'une scène entre les exercices du médecin et une allocution devant le peuple, mais est aussi porteur d'un sous-texte invitant au questionnement.
Même s'il omet en apparence les torts de la royauté durant la seconde guerre mondiale, Le discours d'un roi semble remettre en cause tout un système mais de façon moins appuyée.


Le roi George VI doit son titre à ses liens de sang et non ses compétences, celles-là même qui manquaient à son frère qui fut démis de ses fonctions, et après tout que fait-il si ce n'est lire les discours rédigés pour lui ? Son seul devoir présenté dans ce long-métrage est de les réciter aussi correctement qu'il le peut, suite à quoi ses subordonnés hypocrites le congratulent puis tout son peuple l'acclame.
On y questionne également le pouboir symbolique d'un discours, dressant une superbe parallèle entre celui donnant le titre du film et celui prononcé par Hitler dans une vidéo d'actualités lors d'une scène où le roi avoue à sa fille ne pas savoir ce que dit le Fürher mais qu'il le dit bien.
L'admiration que peut porter David Seidler pour le roi George VI se traduit par un script de qualité, accompagné d'une bonne réalisation, mais elle n'empêche pas de placer dans Le discours d'un roi un message qui expose avec finesse le ridicule d'un constat sur la royauté.

Bande-annonce VOST :

jeudi 17 février 2011

Black swan


Fiche du film :
Réalisateur : Darren Aronofsky
Scénaristes : Mark Heyman, Andres Heinz, John J. McLaughlin
Année : 2010
Genre : Drame / Thriller
Acteurs principaux : Natalie Portman, Mila Kunis, Vincent Cassel
Résumé : Après des années de rigueur et d'efforts, Nina, danseuse de ballet, se fait enfin remarquer. Elle obtient le rôle le plus convoité dans "Le lac des cygnes", une chance inespérée pour elle, mais aussi un poids considérable qui va l'obliger à faire face à la pression de son travail et de ses collègues envieuses.

Avis sur le film :
Le réalisateur de Requiem for a dream, Darren Aronofsky, commença à s'intéresser à la danse classique par le biais de sa soeur qui en fit ses études, mais c'est suite à la vision d'une représentation du "Lac des cygnes" qu'il coupla à un scénario nommé The understudy qu'il établit son projet de Black swan. Celui-ci était déjà prévu depuis le début de cette décennie, avec Natalie Portman attachée en tant qu'actrice ; c'est ce dernier point qui attira plus tard l'attention des studios, mais jusque là aucun script n'était encore rédigé.
Entretemps, Aronofsky réalisa en 2008 The wrestler, qu'il considéra comme la pièce d'un diptyque avec Black swan, les deux évoquant des performances éprouvantes dans des domaines bien différents.


Contrairement à The wrestler l'histoire primait malgré une réalisation qui se faisait remarquer, ici c'est la mise en scène, sublime, qui porte le film. Sans oublier de nous offrir des images magnifiques, tout est fait pour que l'identification visuelle avec le personnage de Nina soit poussée au maximum, la caméra se déplaçant par des mouvements amples pour suivre les pas de danse et virevoltant lorsque la danseuse tournoie jusqu'au vertige. Cette proximité avec l'actrice n'empêche pas des plans avec plus de recul, non moins beaux et qui présentent de très bonnes idées de construction du cadre. Ce plan en mouvement où le professeur de danse suit du regard Nina tandis que le spectateur la voit réfléchie dans les miroirs derrière est d'une ingéniosité qui combine l'esthétique à une simplification narrative évitant le champ/contre-champ, et projete déjà symboliquement le dédoublement du personnage.
La salle d'entraînement, recouverte de surfaces réfléchissantes mises en valeur par le réalisateur, se prête judicieusement bien à l'histoire du double maléfique. Il s'agit d'un des thèmes forts qui s'allie à celui du monde de la danse, évoquant la pression sur les danseuses, la jalousie entres elles, dont certaines qui consacrent leur vie à la danse sans être récompensées ; des problèmes déjà vus et connus du public mais qui restent intéressants. Le monde du ballet est correctement exploité, comme souvent dans les films traitant du spectacle les limites entre vérité et représentation sont brouillées, ici il s'agit plus précisément du jeu de séduction réel ou simulé, dans lequel on peut encore une fois voir une autre forme de représentation de l'aliénation graduelle de Nina.


Allant de pair avec le "Lac des cygnes", les performances de Natalie Portman, pour le peu qu'on puisse voir de son année d'exercice intensif, et la musique retravaillée de Tchaikovsky sont un plaisir pour la vue et l'ouïe ; mais les qualités de Black swan s'arrêtent là, le reste étant principalement un grand amas de clichés accablant.
Dès lors que Vincent Cassel déclare à ses danseuses que tout le monde connaît l'histoire du "Lac des cygnes" sans s'empêcher de la résumer à l'intention du public, le film est déjà tout tracé : il sera question d'une rivalité entre un "cygne noir" et un "cygne blanc", ce dernier y laissant la vie. Le scénario trace ainsi dès les premières minutes une intrigue prévisible, adressée aux membres du public les moins vifs d'esprit, auxquels Aronofsky continuera de faire attention par sa réalisation en se plaçant aux antipodes de la subtilité.
Nina est la fille sage habillée dès le début d'un manteau blanc dont la fourrure n'est pas sans rappeller des plumes et qui n'ose pas se masturber même lorsque son professeur le lui demande, tandis que Lily est la dévergondée tout de noir vêtue qui consomme de l'ecstasy et qui, pour ceux qui n'auraient pas encore compris ce que tout cela signifie, a des ailes noires tatouées dans le dos.
De même avec la musique du "Lac des cygnes", présente jusqu'à la boîte de musique de l'héroïne ou sa sonnerie de portable. Que la mélodie soit imaginée par le personnage qui sombre dans la folie, ou qu'elle soit réellement présente et que la danseuse se tourmente d'elle-même en s'assenant la même symphonie symbole de souffrance pour elle, l'idée est inepte et l'insistance du réalisateur à vouloir tout rendre extrêmement compréhensible est trop pesante.


La représentation de la descente aux enfers de Nina fait pire, aussi bien en matière de clichés que d'acharnement pour faire rentrer une notion dans le crâne du spectateur. La folie de la ballerine est inexpliquée et inexeplicable, et entre sa démence et les visions qui y sont liées, il y a une relation de prétextes allant dans les deux sens. Pour cause d'incapacité à faire intervenir le déséquilibre mental autrement, des hallucinations sont présentes afin de dire que tout ne va pas au mieux dans l'esprit de l'héroïne, et la seule façon trouvée par le film pour que l'on comprenne qu'il y a une aliénation chez elle est de montrer son reflet prendre un air méchant en coupant son doigt. Inversement, la folie nourrit des clichés issus du cinéma d'horreur, un genre vers lequel Black swan se dirige par moments, à se demander pour quelles raisons, surtout au vu du résultat médiocre lors de ces écarts vers le fantastique. Il y a ainsi toujours quelqu'un derrière Nina pour la faire sursauter, et avec aussi peu de finesse que précédemment afin de faire passer un message, elle croit qu'un double d'elle-même la traque. Encore plus incompréhensibles sont ces scènes où l'héroïne croit s'arracher la peau, perdre des ongles, ou voir une rivale se planter une lime à ongle dans la tête ; des moments laids par leur principe et par leur concrétisation visuelle, mais qui n'égalent pas la transformation littérale de Nina en cygne, des plumes sortant de son dos et ses jambes se pliant pour les dernieres personnes en salles à ne pas encore avoir totalement saisi ce qu'il se passait depuis une heure et demie.


La beauté de Black swan est sa plus grande qualité et est ce qui frappe en premier, et si l'harmonie visuelle reste la même tout du long, elle se fait rattraper et ne fait pas le poids contre une histoire qui vire au grotesque, contre une lourdeur explicative qui devient pénible, et contre des clichés insupportables qui ne peuvent pas même trouver leur justification dans la folie.

Bande-annonce VOST :

mardi 15 février 2011

Meurtres à la St-Valentin 3D


Fiche du film :
Réalisateur : Patrick Lussier
Scénaristes : Todd Farmer et Zane Smith
Année : 2009
Genre : Horreur
Acteurs principaux : Jensen Ackles, Jaime King, Kerr Smith
Résumé : Dix ans après un massacre le jour de la St-Valentin perpétré par Harry Warden, un mineur devenu fou qui tua de sa pioche une vingtaine d'innocents, Tom Hanniger revient en ville. Les choses ont beaucoup changé depuis son départ, si ce n'est que le tueur a repris du service.

Avis sur le film :
En 2001, le réalisateur George Mihalka proposait à Paramount de faire une suite à Meurtres à la St Valentin, son slasher devenu populaire au fil du temps, mais son offre fut refusée. Le projet fut de nouveau évoqué en 2006, avec pour idées de développer les personnages du premier film et de faire de l'emplacement de la mine un parc d'attraction. Cela ne déboucha pas, Paramount se montrant en général peu fier de ses slashers, tel que l'on peut le constater par le traitement subi par la saga Vendredi 13, ou par le refus de sortir en DVD une version non-censurée de ce film d'horreur dédié à la fête de Cupidon.
Lions gate racheta donc les droits pour sortir en vidéo la version uncut, en même temps que pour produire un remake en 3D, sorti en 2009 un mois avant le jour des amoureux.


En cinq minutes, le film présente déjà tous les symptômes du mauvais remake d'horreur rempli de facilités et de clichés afin de s'adresser à une nouvelle jeune génération qui a besoin d'un amas disproportionné de chair fraîchement mise à vif, en 3D qui plus est, pour hurler dans les salles de cinéma. C'est tout naturellement que les personnages ont pris un coup de jeune, présentés d'abord comme des adolescents vulgaires et buvant en faisant la fête sur une musique rock, et que les premiers meurtres, effectués sans qu'il y ait besoin de la moindre justification si ce n'est le simple désir de placer une dizaine de cadavres en un minimum de temps, sont d'une abusive gratuité et d'une démesure outrancière agaçante car dénuée d'un recul comique indispensable. Tout juste sorti du coma, Harry Warden laisse derrière lui un hôpital aux murs exagérément recouverts de sang et plein de cadavres grossièrement mutilés, dans lequel le sheriff déambule avec une nonchalance propre à une situation ordinaire, comme si le réalisateur pensait pouvoir attribuer un caractère sérieux à une scène si grotesque.
D'autre part, la 3D évite d'avoir à perfectionner les effets gores, ceux-ci trop clairement réalisés en CGI, comme à demi-achevés ; et l'usage de cette technologie imposant le port de lunettes spéciales ne donne pas dans le cas présent l'impression d'avoir évolué depuis les années 80, avec Meurtres en trois dimensions ou Les dents de la mer 3, car tout est prétexte à filmer un poing ou une pioche en gros plan pour percuter le spectateur en pleine face.


La même débauche visuelle que pour les tueries se retrouve dans l'autre part du film axée sur les habitants, avec des scènes effarantes dont celle où une femme court nue pendant un bon moment, armée puis traquée et tuée, tout cela en tenue d'Eve. Meurtres à la St-Valentin 3D se permet ce genre de libertés alors que du reste l'intrigue du film original est globalement reprise, avec quelques modifications de statuts chez les protagonistes. Par contre concernant le tueur, si son excuse pour assassiner en masse était légère dans le premier film, il n'y a désormais plus aucune raison évoquée pour justifier le massacre, et si cela arrive le 14 février, il faut en déduire que c'est par pur hasard.
A croire que le remake a pioché chez le slasher de 1981 en ne l'ayant vu que d'un oeil distrait, oubliant des morceaux essentiels pour que l'ensemble tienne debout, mais peu d'importance semble être accordée à la consistance du scénario. Le tueur a le pouvoir d'apparaître où et quand bon lui semble, et les acteurs ne sont pas plus convaincants, peu aidés par les situations et dialogues saugrenus qui façonnent leurs rôles.


Pour couronner le tout, la réalisation et l'esthétique se rapprochent plus d'un téléfilm que d'une grosse production, le montage ne se montre pas assez réactif lors des combats, et la musique fait le minimum en enchaînant principalement des sons souvent atonaux censés évoquer une émotion.
Meurtres à la St-Valentin 3D est un modèle de remake raté, échouant sur pratiquement toute la ligne, même les mises à mort parvenant difficilement à remonter le niveau. A espérer que la fin ouverte, qui se situe juste après un twist risible, ne donne pas lieu à une suite.

Bande-annonce VOST :

dimanche 13 février 2011

Meurtres à la St Valentin


Fiche du film :
Réalisateur : George Mihalka
Scénaristes : John Beaird et Stephen A. Miller
Année : 1981
Genre : Horreur
Acteurs principaux : Paul Kelman, Lori Hallier, Peter Cowper
Résumé : Il y a 20 ans, le mineur Harry Warden s'est retrouvé enterré vivant après une explosion, qui n'a pu être empêchée car les responsables du lieu étaient partis pour un bal de la St Valentin. Harry a survécu en mangeant ses collègues, et une fois ressorti des décombres, il est devenu fou et s'est vengé de ceux responsables de son calvaire. De nos jours, la ville tente d'oublier cet évènement fâcheux, mais alors qu'une nouvelle fête des amoureux se prépare, Harry revient, courroucé, tuant les organisateurs afin que le bal de cette année soit annulé.

Avis sur le film :
Grâce à sa première réalisation, la comédie Pinball summer, George Mihalka fut contacté par les directeurs de Cinepix productions pour réaliser un slasher, sous-genre du film d'horreur en vogue dans les eighties. A l'origine titré The secret, le film devient Meurtres à la St Valentin pour mieux insister sur le fait qu'il apporte la terreur en un jour de fête populaire, et se place par la même occasion à la suite de Black christmas, Halloween ou Vendredi 13, avec lesquels il partage également un statut de culte.


Le film s'est surtout fait connaître pour la censure qu'il a subie, la première version ayant été classifiée "X" avant d'être coupée, Paramount se méfiant par ailleurs de la violence excessive après les critiques envers leur saignant Vendredi 13 sorti un an auparavant. Toutes les scènes de meurtre ont ainsi été amputées, sans quoi Meurtres à la St Valentin aurait pu briller par ses effets gores placés avec autant de complaisance que dans le film de Jason Voorhees. Ce n'est que 28 ans après, peu avant le remake, qu'est sortie la version non-censurée, telle que le réalisateur souhaitait que sa création soit.
Le grain de l'image inscrit le film dans son temps, avec en supplément des défauts de pellicule lors des scènes qui ont été originellement coupées ; il en est de même pour les effets spéciaux d'antan qui sont loins de l'esthétique moderne, mais probablement plus proches de la réalité. La peau transpercée semble palpable, le coeur arraché paraît dégonflé mais n'a rien de théâtral, un réel travail sur la matière est constatble ; les trucages sont bons la plupart du temps, et toujours plaisants par leur violence très démonstrative.
L'oeuvre se sert tout de même d'astuces ridicules, relatives à cette époque où elles étaient acceptées car surprenaient encore le public. Pour tenter de donner quelques frayeurs totalement gratuites, les cinéastes font appel à un personnage faisant une farce à ses amis, allant ici jusqu'à se couvrir de faux-sang, comme cela a aussi été fait plus tard dans Vendredi 13 chapitre final.
La réalisation fait également appel à de grosses ficelles risibles par leur manque de subtilité, notamment lors du flashback où les responsables de l'incident dans la mine ne sont présentés que par leur rire tonitruant prouvant leur vilenie.


Le récit se déroule dans une petite ville vivant de l'activité de sa mine, et le film s'en sert pour ses proies et pour son prédateur, avec d'un côté ces gais lurons de mineurs et de l'autre le maniaque qui bâtit son look sur l'aspect inquiétant de sa tenue de travail équipée d'un masque à gaz. Comme Michael Myers ou Jason Voorhees, le tueur se montre peu expressif et on ne voit jamais son visage, et pourtant il a une histoire. Cependant celle-ci, purement basique, s'arrête au prétexte aussi écervelé que le serait un fou furieux sorti de l'asile, et n'a pour but que d'attacher le 14 février à une série de meurtres brutaux.
Du côté des jeunes fêtards, les scènes tournent régulièrement autour d'une histoire de reconquète amoureuse, qui est plus un moyen de relier les apparitions des victimes entre elles qu'une intrigue digne d'intérêt. Leurs déboires laissent indifférent, et en plus de cela comme tout bon troupeau issu d'un slasher et prêt à être abattu, ils persistent à se jeter dans la gueule du loup en se rendant, amusés, dans la mine, lieu sombre et reculé d'où il est difficile de sortir. Le comportement des protagonistes est parfois inexplicable, une des filles venant de voir son amie tuée pousse à se demander pourquoi elle ne prend pas ses jambes à son cou, mais ce genre de problèmes est probablement lié à un processus de montage complexifié par la censure.


La réalisation a ses bons aspects, aux moments opportuns, elle sait se servir des bruits de l'environnement ou d'une action dans la scène pour créer une ambiance angoissante, mais ce sont tout de même les massacres qui constituent une grande part de l'intérêt du film. Leur disparition de la version cinéma a de quoi causer une grande frustration, surtout à cause de leurs coupes visibles, ainsi qu'un manque de compréhension puisque les ellipses ainsi causées font découvrir, sans explication, qu'un personnage est mort ou a perdu un bras.
Difficile de s'imaginer, dans ces conditions, comment le public de l'époque a pu apprécier le film, surtout qu'une fois restauré Meurtres à la St Valentin, malgré une mise en scène et un scénario convenables, n'est qu'un slasher correct.

Bande-annonce VO :

jeudi 10 février 2011

Time code


Fiche du film :
Réalisateur et scénariste : Mike Figgis
Année : 2000
Genre : Drame
Acteurs principaux : Salma Hayek, Stellan Skarsgård, Jeanne Tripplehorn, Richard Edson
Résumé : Le parcours de quatre personnes en simultanée au cours d'une heure et demie décisive de leur vie.

Avis sur le film :
Mike Figgis, dont le film le plus connu est Leaving Las Vegas avec Nicolas Cage, n'a jamais vraiment percé dans le milieu du cinéma, même avec son film-concept révolutionnaire Time code réalisé en 2000. Qu'un film aussi ambitieux ait pu se concrétiser avec la faible notoriété de son créateur est une chance pour le cinéaste lui-même, et également pour le public qui peut découvrir une oeuvre dont la seule évocation de la promesse de départ attire inévitablement l'attention : celle d'un long-métrage uniquement constitué de quatre plans séquences. En même temps.
L'écran partagé en quatre portions égales suit quatre personnages principaux pendant une heure et demie en temps réel, sans aucune coupe, ce qui représente une performance ayant nécessité d'être répétée 15 fois avant d'en arriver au résultat final.


L'utilisation de chaque case est à la hauteur du concept de base, et contrairement à ce qui aurait pu arriver, une case seulement est régulièrement délaissée. Pour les trois autres, le passage à vide se fait rare, et l'ennui est évité par l'importance portée au timing et au pouvoir d'improvisation des acteurs. Malgré un mixage sonore indiquant vers quelle partie de l'image se tourner, l'impression qu'il se passe quelque chose digne d'intérêt quelque part sur l'écran est quasi-permanente, et dans les quelques cas où le son d'une des vidéos n'est pas prédominante, le spectateur a le choix de ce qu'il veut voir.
Le concept est déjà doué d'une grande puissance mais le cinéaste ne se repose pas sur ses lauriers et ne laisse pas stagner sa création, puisques les personnages échangent leur case, certains se croisent, d'autres disparaissent pour laisser sa caméra filmer une personne sous deux angles différents, et sans jamais que les coulisses ne nous soient accidentellement dévoilées, alors même que des miroirs et des surfaces réfléchissantes viennent apparaître derrière les protagonistes.
Mike Figgis joue avec le feu alors qu'une seule erreur pourrait gâcher en même temps quatre prises uniques, ce qui rend le projet d'autant plus admirable rien qu'à l'idée qu'une faute puisse être commise. Et pour corser davantage l'affaire, trois tremblements de terre simulés viennent mettre à l'épreuve la synchronisation de chaque acteur faisant semblant de tomber et de chaque cameraman obligé d'imiter le phénomène sismique par les secousses qu'ils infligent à leur outil de travail.


Time code sait aussi varier les genres, usant facilement de son principe pour en tirer des scènes de comédies, mais passe aussi par le drame via son scénario. La musique, comme les prises, ne s'arrête jamais ou preque, et arrive à s'adapter à chaque situation sans que le ton ne change brusquement. Il lui arrive par moments de correspondre à un même état d'esprit présent dans chaque case, une impression à quelques instants renforcée lorsque chacun des quatre protagonistes effectue une action similaire, requérant encore une fois un timing impeccable. Le plus impressionnant restant la situation où une musique jouée par un personnage, agréable à l'écoute qui plus est, correspond à ce qu'il se passe ailleurs au même moment.
Une surprise qui ne soit pas purement formelle attend le spectateur vers la fin par une mise en abyme, entre auto-dérision parodique et note d'intention du réalisateur, à travers la figure fictive d'une jeune cinéaste citant Vertov et Eisenstein à tout-va pour appuyer son discours pompeux censé présenter sa prochaine création qui, contrairement aux débuts de l'art cinématographique, ne représenterait pas l'innovation par le montage mais par son absence totale. Figgis surprend encore une fois, différemment, en même temps qu'il amuse et qu'il prend à contre-courant de potentielles critiques quant à la prétention de son long-métrage.


Avec un tel exercice de style en son noyau, Time code n'est pas exempt de quelques défauts, que ce soit l'apparition furtive de la réfléxion de la main d'un cameraman ou l'interpellation d'une actrice par son vrai nom, mais ce ne sont que des détails mineurs qui peuvent passer inaperçus et qui ne nuisent aucunement à l'ensemble et à l'admiration qu'il peut susciter.
Le corps humain n'est pourvu que de deux oreilles, sans quoi le son aurait lui-même certainement été divisé en quatre, à condition que le cerveau puisse traiter toutes les informations reçues, mais l'oeuvre de Mike Figgis joue justement sur la discordance entre les possibilités offertes par la vue et par l'ouïe. Le film jouit déjà d'une grande interactivité visuelle pleine de libertés avec le spectateur, de quoi pouvoir revoir l'oeuvre à plusieurs reprises et différemment à chaque fois. L'image seule suffit quoi qu'il en soit pour que Time code transcende la perception classique du cinéma, donnant sens à cette citation de Suck my geek : "Ce n'est pas un film que j'ai vu, c'est une expérience que j'ai vécue".

Bande-annonce VO :

lundi 7 février 2011

Equilibrium


Fiche du film :
Réalisateur et scénariste : Kurt Wimmer
Année : 2002
Genre : Action / Science-fiction
Acteurs principaux : Christian Bale, Taye Diggs, Emily Watson
Résumé : Dans une société où les émotions sont interdites, un représentant de la loi se rebelle contre le système.

Avis sur le film :
Pour sa seconde réalisation Kurt Wimmer donne vie à un de ses scripts qui l'engage sur la voie de la science-fiction avant qu'il ne passe plus tard à Ultraviolet et au remake de Total recall.
Avec Equilibrium, il tisse un patchwork à peine dissimulé où le message de Fahrenheit 451 mêlé à celui de 1984 épouse la forme de Matrix auquel le cinéaste ajoute le "gun kata", son style de combat fictif alliant arts martiaux et armes à feu.


L'ensemble n'est pas pour autant une copie conforme, les thèmes sont similaires mais l'intrigue qui les réunit se différencie, tout d'abord par une simplification naïve de l'histoire à la base du film qui nous présente un monde où les émotions sont effacées à coups d'injections médicamenteuses dans la nuque, et ce dans le but d'éradiquer la guerre et le meurtre. Un procédé inepte et radical, qui n'empêche pourtant pas le scénariste de garder dans le flou les limites de la règle qu'il a créée, laissant après tout ses personnages afficher quelques expressions sur leurs visages et utiliser des termes tels que "satisfait" ; des entorses certainement nécessaires pour ne pas ennuyer par une déprivation totale de dialogues, reflets d'une envie de discuter qui ne soit pas purement pragmatique.
Ce concept de départ sert essentiellement à établir une société dictatoriale comme tant d'autres, et à critiquer un système avec une insistance qui ne délaissera pas les spectateurs longs à la compréhension. Equilibrium ne fait pas dans la finesse pour assimiler sa société futuriste à un régime nazi, par le biais d'un logo similaire à la croix gammée, ou pour montrer que le héros est assailli par les sentiments lorsqu'il tient dans ses bras, attendri, un chiot de longs instants, au risque de se faire repérer par ses collègues censés arrêter les "déviants émotionnels".
Malgré des idées qui exploitent correctement la base du film et des rebondissements surprenants alors même que l'on sait que les gentils vont gagner, ce n'est pas par son scénario que brille Equilibrium, mais par son second aspect qui fait suite au message pseudo-intellectuel : celui qui se veut simplement fun.


Les premières fusillades où la caméra tremble, où les coups de feu fusent de partout en CGI et où le montage coupe sans arrêt font penser à un fan-film qui mise tout sur les scènes d'action modifiées par ordinateur faute de savoir saisir l'attention de l'internaute autrement. Cette impression de travail amateur ne revient qu'à la fin avec quelques explosions trop factices, et par moments avec une utilisation peu subtile des teintes. Du reste, le film s'est bâti sa réputation pour ses scènes d'actions, qui ont recours aux traditionnels pistolets, bâtons, katanas et coups de poings, mais avec un traitement quelque peu nouveau. Christian Bale joue un surhomme capable de tuer tous ses adversaires grâce à des formules mathématiques sans jamais se faire toucher, ce qui est pour le moins invraisemblable mais souvent spectaculaire. Les pouvoirs de ce combattant ne s'épuisent pas, et il en vient au fur et à mesure à tirer quasi-immédiatement avec une arme qu'il vient de ramasser et de faire tournoyer par dessus son épaule, ou à recharger avec des cartouches cachées dans ses manches.
La véritable innovation reste tout de même le "gun kata", et plus précisément dans la scène de combat finale qui donne vie à une idée maintenant d'apparence si simple mais inédite : un combat où les adversaires se frappent avec leur revolver tout en essayant de tirer sur l'autre à bout portant.


La mise en scène peut se montrer astucieuse pour manipuler le spectateur, ou d'autres fois échouer à rendre un combat crédible en ne masquant pas les coups portés dans le vide. Elle est à l'image de ce film à deux facettes, entre fautes flagrantes et bonnes idées marquantes, entre message enfantin proclamant le bien des émotions contre le mal des dictature et passages décomplexés réussis. Equilibrium est loin d'être aussi malin qu'il tente de le faire penser ; contrairement à ce que Wimmer voudrait faire croire en essayant de créer de la profondeur avec sa parabole enfantine, les scènes d'actions sont le vrai sujet du film et sont sa principale qualité, même s'il arrive à faire illusion dans son ensemble avec son recyclage de propos.

Bande-annonce VF :

jeudi 3 février 2011

Another year


Fiche du film :
Réalisateur et scénariste : Mike Leigh
Année : 2010
Genre : Comédie dramatique
Acteurs principaux : Jim Broadbent, Ruth Sheen, Lesley Manville
Résumé : Tom et sa femme Gerri sont un couple âgé mais toujours actif, profitant de chaque instant de leur vie ensemble. Leurs proches ne sont pas tous aussi comblés, et auraient de quoi envier leur bien-être.

Avis sur le film :
Le décès de son producteur attitré Simon Channing-Williams, remplacé ici par Georgina Lowe, poussa Mike Leigh à se pencher plus en avant sur le thème de la vieillesse qui le touche désormais plus personnellement du haut de ses 66 ans. Bien qu'il l'ait déjà traité par le passé, dans Another year il le place au premier plan, accompagné d'acteurs tels que Jim Broadbent et Lesley Manville qui l'ont déjà maintes fois croisé durant sa carrière et qui ont eux aussi, depuis, atteint un âge avancé.
Comme à son habitude, Leigh n'avait pas son scénario ni ses personnages alors qu'il avait choisi ses acteurs, travaillant avec eux à écrire le film à partir d'improvisations durant les répétitions.


A suivre pendant plus de deux heures la vie d'un couple de sexagénaires de façon fidèle à la banalité de la réalité, Another year suscite peu d'attentes, et c'est justement ce qui est nécessaire pour accepter de le suivre comme un nouveau jour tout à fait ordinaire, avec ses passages à vide mais également ses quelques surprises alors que le chemin aurait pu être tout tracé. Là où d'autres films à l'intrigue épurée ennuyent, la dernière oeuvre de Mike Leigh apporte une dose d'humour, non pas digne d'une comédie, tout juste à la hauteur de blagues spontanées lancées au cours de discussions réelles, mais qui font au moins sourire et que l'on accepte volontiers grâce à la bonhomie des personnages. Tom et Gerri en particulier, qui sont des personnes que l'on admire pour leur amabilité permanente, à se demander si un comportement pareil peut se retrouver chez des individus existants bel et bien. Le film ne tombe pas dans la caricature pour autant, à l'opposé du personnage de Flanders dans Les Simpsons, et les acteurs font sentir qu'il existe entre eux un lien fort qui les fait apprécier la vie telle qu'elle est, sans aucun stress ni but précis, bercés par une infinie tranquilité qui leur procure un bien-être qu'ils partagent avec plaisir en accueillant leurs amis chez eux.


Les personnages sont suivis au cours de quatre saisons, mais à chaque fois résumées en un seul évènement en apparence banal et qui, pourtant, suffit à concentrer tout ce qu'il faut savoir. Nombreux sont les individus malheureux qui gravitent autour de Tom et Gerri ; parmi eux Mary la cinquantenaire qui désespère de trouver l'amour et qui pense que l'achat d'un véhicule d'occasion lui apportera un changement tant attendu dans sa vie. Etant la seule invitée récurrente, puisqu'elle s'impose toujours à l'improviste, cette femme est le sujet d'un apitoiement croissant en même temps que le film nous fait part de son évolution, qui tend essentiellement au négatif. Mary pourrait envisager de sortir avec Ken -ce pauvre homme délaissé, se lamentant lorsqu'il boit de trop sur le bon vieux temps et sur feu sa femme - mais elle préfère Joe, le fils de son couple d'amis. De quoi donner lieu à des situations perturbantes pour le spectateur qui grince des dents car saisit tout ce qui se trame. La réalisation n'est pas pour autant caricaturale pour faciliter la compréhension, si ce n'est légèrement en dernière partie, celle correspondant à l'hiver où les teintes tirent exagèrement vers le bleu glacial pour insister sur le changement radical de ton. En effet, la quatrième saison présentée s'ouvre sur un enterrement et brise avec le reste du long-métrage en passant à une atmosphère beaucoup plus tendue, où même Tom et Gerri éclipsent leur image trop parfaite en ne dissimulant plus leur agacement concernant Mary.


Mike Leigh en dit peu par son scénario, et ne se positionne pas réellement par rapport à ses personnages, jouant souvent sur les non-dits, et c'est justement ce qui interroge moralement le spectateur sur la façon dont il perçoit le comportement de chacun. Si les raisons des agissements de chacun d'eux sont compréhensibles dans un camp comme dans l'autre, le discernement d'un spectateur ou d'un autre peut faire de Tom et Gerri des hypocrites ou un couple bienveillant et de Mary une victime ou une plaie.
Au contraire la caméra est plus expressive, insistant subtilement sur ce qu'il faut, notamment pour créer une certaine empathie avec les personnages, indispensable dans le cas présent afin de suivre et d'apprécier le film de bout en bout.
Another year ne présente, comme son titre l'indique, qu'une année de plus, certainement pas plus passionnante qu'une autre mais pas moins non plus. Une année qui passe sans que les personnages n'aient atteint un point d'arrivée, qui ne pourrait être nous être présenté qu'au cours d'une autre année, ce qui n'est toutefois pas nécessaire puisque le film se quitte sans regrets comme l'on partirait d'une soirée tout juste sympathique, sans besoin d'en voir plus ni désir de revenir en arrière.

Bande-annonce VOST :