mercredi 30 mars 2011
Boxing gym
Fiche du film :
Réalisateur : Frederick Wiseman
Année : 2010
Genre : Documentaire
Avis sur le film :
A 81 ans, Frederick Wiseman poursuit son projet documentaire commencé au début des années soixante, profitant souvent depuis lors du droit de regard critique qu'ont les citoyens Américains envers leurs institutions pour filmer en toute liberté les établissements qu'il choisit. Le cinéaste avait pourtant fait un détour par la France en 2009 avec La danse, mais revient aux Etats-Unis par le lien qu'il imagine, comme Darren Aronofsky entre The wrestler et Black swan, entre la lutte physique de deux adversaires et les exigences du monde du ballet. Dans tous les cas, le réalisateur garde comme fil rouge l'idée d'observer une communauté.
Hormis les sujets évoqués par les clients du club d'entrainement, à l'image Boxing gym se restreint uniquement au monde de la boxe pour presque ne jamais s'en séparer durant toute sa durée. Le sujet peut être intéressant dès lors que le réalisateur fait en sorte qu'il le soit, mais ce n'est pas ce que fait Wiseman ici.
Le cinéaste filme généralement pendant quelques semaines, un temps assez cours par rapport aux nombreux mois de montage qui suivent ; il s'agit d'une technique qui fonctionne quand il se penche sur des établissements tels qu'un institut psychiatrique ou une caserne militaire, qui sont faciles à critiquer et dont on peut aisément se servir des images en post-production pour en faire ressortir une vision négative de ce qu'il s'y passe, mais que dire sur un club de boxe ?
Justement, que ce soit sur place ou dans la salle de montage, Wiseman n'a aucun message à faire ressortir et se place plus que jamais comme simple observateur. Pourtant une des premières scènes avec un homme qui emmène son bébé à la boxe et qui, entre deux frappes dans un sac de sable, va lui caresser les pieds avec ses gros gants, laissait présager un regard plus critique.
C'est dramatique mais du coup Boxing gym donne l'impression qu'on ne peut faire un documentaire intéressant s'il n'y a rien à dénoncer.
La caméra ne suit même pas l'un des clients du club de gym, et elle ne fait que saisir des bouts de conversation qui perdent tout intérêt car ne donnent pas suite, de par le manque total de continuité dans le montage. Wiseman ne nous apporte pas plus que ce que n'importe qui pourrait saisir en allant espionner des passants dans un lieu public, et se sépare de ses sujets avant de savoir où vont les mener les problèmes personnels qu'ils évoquent. Des clients dans Boxing gym parlent tout de même, sujet digne d'intérêt par son caractère particulier, d'une fusillade dans une école, mais le spectateur ne saura jamais le fin mot de l'histoire.
Le travail de Wiseman et de son collègue est tout de même remarquable. Son cadreur réussit à prendre des images sur le vif, improvisées, mais de telle sorte que l'on puisse croire à une chorégraphie qui permet d'avoir des cadres bien remplis.
Le montage paraît souvent enchaîner les images arbitrairement, mais les raccords entre elles sont soignés. Le travail de son, et pas seulement pour les raccords, est marquant. Le bruit abonde, comme si la salle d'entraînement débordait sans cesse de vie. Mais c'est bien de là que vient l'un des problèmes du film : le spectateur est oppressé par ce bruit incessant. Une heure et demie dans une même salle de gym, avec des bruits de coups, et d'appareils, et de cette machine à bips, sans cesse, ne donnent plus qu'une envie, celle de sortir de la salle, que ce soit celle de gym ou celle de cinéma.
L'inquiétude quant à savoir si tout le film va n'être qu'un enchaînement de frappes dans des sacs de sables et de bruit de coups est présente dès le début. Malheureusement elle se confirme plus tard, la majorité du documentaire ne présentant que ça et ne laisse le public respirer qu'un instant, le temps de quelques plans à l'extérieur du club, mais pour retourner à l'intérieur peu après.
Wiseman n'a probablement pas perdu son talent, mais ne trouve plus de lieux méritant d'être filmés. Boxing gym a donc pour seul mérite d'être bien réalisé, pour un sujet totalement vidé de son potentiel intérêt.
Bande-annonce VOST :
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