dimanche 17 avril 2011

Scream 4


Fiche du film :
Réalisateur : Wes Craven
Scénariste : Kevin Williamson
Année : 2011
Genre : Horreur
Acteurs principaux : Neve Campbell, Courteney Cox, David Arquette
Résumé : Cela fait dix ans que Woodsboro est redevenue paisible, les survivants des massacres qui se déroulèrent en ce lieu ont pu reprendre une vie normale, et même Sidney a su se remettre de son passé difficile en écrivant un livre sur le sujet. C'est justement pour une séance de dédicace de son best-seller qu'elle revient dans sa ville natale ; malheureusement Ghostface fait son grand retour en même temps, menaçant encore une fois ceux qui ont échappé aux précédents porteurs du masque de fantôme.

Avis sur le film :
A l'orée des années 2000, la saga Scream se clôturait avec le troisième épisode, prévu pour être le dernier. Malgré cela et également des conditions de mise en boîte du film particulières, Kevin Williamson ayant été remplacé par un autre scénariste et Wes Craven étant revenu à la mise en scène uniquement parce que cela lui permettait de prendre les commandes sur une comédie romantique dont il voulait s'occuper, le réalisateur des trois autres films a accepté de revenir pour un épisode quatre si le script était aussi bon que celui du premier.
Ehren Kruger, qui avait écrit le le troisième film, revint lui aussi, mais finalement, officiellement du moins, en dépit d'une controverse concernant ses retouches sur le script, Kevin Williamson est le scénariste crédité.
Malgré une dégradation progressive de la saga depuis le premier opus, en prenant un recul de dix ans, Scream 4 allait-il pouvoir se renouveler ? Wes Craven est considéré comme un maître de l'horreur mais n'a pas été à l'origine que de bons films, si l'on s'en réfère à Swamp thing ou Freddy sort de la nuit, et la création la plus aboutie de Kevin Williamson reste son tout premier script ; les deux sont de retour, mais allaient-ils former un duo gagnant ?


Williamson affirme sa présence par une scène d'introduction qui, tel que c'est devenu la tradition dans la saga, doit être d'emblée un moment très fort. Une décennie s'est écoulée depuis le dernier film, et le scénariste en profite pour faire un bref bilan sur ce qu'il s'est passé entretemps, avec l'apparition du torture-porn surtout. Un pique est lancé aussi à la sortie de suites à répétition qui délaissent la qualité au profit de la quantité, par le biais d'une mise en abyme multiple ; seulement même si ce début est très drôle, Williamson cède là à la facilité alors qu'il livrait des échos au cinéma bien plus pensés au sein même des précédents épisodes.
La mode du gore extrême façon Hostel ou Saw, bien qu'il s'en moque, Scream 4 l'adopte, mais avec la volonté de placer les scènes crades entre des passages d'un vrai scénario. Il est quand même troublant de voir assez tôt un corps éventré, les tripes dehors, qui a recoloré toute une pièce. L'image en elle-même n'est pas dérangeante, mais c'est le fait de voir ça dans cette saga qui était loin d'effrayer ou de dégoûter jusque là, à part probablement les jeunes spectateurs les plus sensibles. C'était le propos sur le slasher qui était passionnant avant tout, et l'étalage d'hémoglobine dans cette suite laisse à craindre qu'un nouveau spectacle, celui qui veut écoeurer par ses images, ait pris la place de la réflexion sur le film d'horreur.


Randy est mort et certainement enterré, et cette fois il n'est pas question de le faire revenir par une autre VHS qu'il aurait enregistré au cas où il y aurait eu une troisième suite au massacre de Woodsboro, mais sa place est visiblement prise par deux nouveaux cinéphiles. Ce qui pourrait être une facilité scénaristique qui consisterait à créer des personnages dont on a besoin peut s'expliquer par l'idée du film de donner l'impression de voir un "remake" du premier. Ainsi nous retrouvons aussi quelques autres figures similaires, comme la policière maladroite et le petit ami menaçant que l'on soupçonne tous deux à cause de leur comportement suspect qui se manifeste à un moment ou un autre, bien qu'il serait trop facile que ce soit eux. Par contre, la venue de la cousine de Sidney, elle, paraît plus que les autres servir à remplir une fonction précise. Elle n'a jamais été évoquée, et elle apparaît car c'est pratique pour engager cette suite avec un nouveau membre de la famille Prescott à menacer. Cela rappelle d'une certaine façon la série des Halloween, qui faisait rescussiter des personnages quand ça arrangeait les scénaristes successifs, mais Scream 4 n'a pas de recul par rapport à ça pour que ce soit traité avec ironie.
Concernant les éternels survivants, les trois seuls à s'en être tiré finalement, Sidney est devenue connue, a sorti un livre, raison pour laquelle elle revient dans sa ville natale, ce qui relance les meurtres. A se demander comment elle fait pour ne pas devenir complètement folle, avec toutes ces fois où Ghostface l'a attaquée.
Dewey et Gale sont encore ensemble, et heureusement il n'y a plus de retour en arrière dans la relation comme dans Scream 3 où ils s'étaient perdus de vue.
L'attachement au trio persiste, bien qu'ils soient assez peu mis en avant dans ce quatrième opus.
Le scénario ne traite que brièvement du fait que chacun est plus âgé, et concernant Mr et Mrs Riley il y a un début d'histoire où quelqu'un essaye de s'immiscer dans le couple, mais qui est assez vite abandonné, les personnages secondaires étant assez peu développés aussi et, comme le fait remarquer une fille dans l'introduction, sont pour la plupart présents uniquement pour mourir.


Le problème du propos est assez vite dépassé, car contrairement au troisième film qui tentait de trouver des règles là où il n'y en avait pas, cette nouvelle suite assume le fait qu'il n'y a pas de règles. Scream 4 n'a pas de propos nouveau sur le slasher, et cela s'accepte au fil du film, lorsque nous voyons qu'aucun des cinéphiles ne sort de discours décrivant le cinéma d'épouvante tel qu'il est aujourd'hui.
Il faut accepter ce principe, et le film fait en sorte pour que ce soit le cas en nous amenant doucement à la conclusion que, effectivement, de nos jours il n'y a plus de grand mouvement qui régit le cinéma d'horreur.
La bande-annonce était mensongère, mais dans le cas présent c'est bien mieux ainsi. Contrairement à ce que l'on voulait nous faire croire et que nous pouvions craindre, le quatrième opus n'invente pas de sottises comme "les vierges peuvent mourir" ou "les meurtres doivent être filmés" afin de faire exister son script.
Les blondes à forte poitrine ne sont pas forcément stupides, n'importe qui peut mourir, Ghostface peut faire ce qu'il veut : il n'y a plus de règles prédéfinies et à partir de là tout peut arriver dans Scream 4.
Dénué de message ou de sous-texte, cet épisode joue avant tout la carte du fun. Les meurtres sont beaucoup plus nombreux, plus trashs, plus douloureux, et à la fois plus plaisants à voir. Il y a de très bonnes idées, bien surprenantes, que ce soit dans la façon de tuer ou dans la mise en scène qui amène doucement à l'assassinat.
Suite plus comique également, mais heureusement, encore une fois, pas de la façon dont le laissait penser cette bande-annonce fort heureusement trompeuse. Pas de "Allo, quel est ton film d'horreur favori ? - C'est pour toi." ou de "Les vierges peuvent mourir - Ca veut dire que j'ai moins de chances qu'elles ?". Ce n'est pas plus fin non plus dans la version finale de ce long-métrage, il y a des phrases drôles maladroitement placées dans un contexte dramatique, mais il y a de bonnes répliques, Gale entre autres étant - comme elle le dit - encore en forme, des gags visuels efficaces, et un humour qui s'allie facilement au sadisme de certaines des mises à mort.
Il faut croire aussi, par rapport à des passages dévoilés lors de la promotion, que plusieurs scènes ont été coupées ou modifiées (le plan où Gale parle justement de l'info sur le net, Gale qui dit au tueur de la frapper si il l'ose, le texte "What's your favorite scary movie ?" en lettres de sang), ce qui n'est pas plus mal car, tel que l'on peut imaginer leur place dans le film, le rythme est plus fluide, et quelques passages trop décalés par rapport au ton de l'ensemble ont certainement été retirés, notamment la réplique "Fingers crossed on some nudity for a change ?", qui aurait eu du mal à trouver sa place.


La webcam et la diffusion d'images en streaming remplacent la caméra cachée et le moniteur vidéo du premier film, les personnages peuvent regarder sur leur iphone ce qu'il se passe en direct, et le caractère portatif de l'objet permet de multiplier les passages angoissants où le tueur est vu par l'appareil avant d'être vu par la victime.
Ce qui est intrigant c'est que Williamson ne se soit pas tellement servi de la démocratisation contemporaine du téléphone portable qui aurait sans aucun doute pu avoir une place plus importante dans le scénario, alors qu'ici il sert principalement à faire se dérouler en extérieur des scènes qui, il y a quelques années, se seraient passé en intérieur.
Le scénariste est tout de même toujours aussi imaginatif, il prouve qu'il a encore des idées superbes qu'il veut partager avec le public, mais certains points clés de l'intrigue qui amènent à des scènes très plaisantes posent problème.
Comme souvent, après un spectacle réussi où le tueur est insaisissable et a tranché à tout-va, la révélation de son vrai visage est délicate, puisqu'on ne peut tellement concilier la logique des meurtres commis avec la crédibilité de l'identité. Le dévoilement dans Scream 4 est difficilement acceptable, de même pour le plan du tueur, qui est suivi d'une sorte de révision de la scène d'auto-mutilation dans Fight club trop grand-guignolesque. Certains ont ri dans la salle, même s'il est compliqué de déterminer si l'intention était d'en faire un passage comique, et si c'est le cas, c'était inapproprié.


On ne peut tellement en vouloir non plus à Scream 4 pour ses incohérences, grosses comme un camion mais présentes dans des scènes assez brèves pour ne pas déranger trop longtemps, puisqu'en contrepartie il procure un grand plaisir.
Il y a des affrontement violents et inattendus, une cruauté maline, des références amusantes à la culture cinématographique d'hier et les réalisateurs les plus décomplexés d'aujourd'hui, et beaucoup de bonnes idées malgré le fait qu'on en soit arrivé à l'épisode quatre.
De plus, Wes Craven, malgré ce que peut laisser penser l'affiche de La colline a des yeux dans le ciné-club du lycée, n'a pas de tant de prétention. En tout cas pas celle qui lui faisait dire, avec son scénariste, dans Scream 2, que les suites sont meilleures que l'original.
Ce quatrième fragment de la saga s'affiche plus ou moins comme un remake, mais si le personnage de Kirby perd à la question concernant les nouvelles versions battant l'original, c'est que le réalisateur et le scénariste ne cautionnent pas cette tendance, et sont conscients que leur Scream original était le meilleur.
"Don't fuck with the original", nous dit Sidney, ce qui a le mérite d'être clair.
Craven et Williamson savent définitivement maîtriser l'auto-dérision sans saboter leurs oeuvres non plus, celles-ci pouvant toujours être bonnes, même si cela ne veut pas dire être au même niveau d'habileté que Scream premier du nom.

Bande-annonce VOST :

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