Fiche du comic :
Auteurs : Garth Ennis, Ron Zimmerman, Tom Peyer
Dessinateurs : Steve Dillon, Mike Lilly, Manuel Guttierez, Darick Robertson
Années : 2000-2001
Résumé : De retour à New York, Frank Castle compte bien manifester aux criminels sa présence par un grand coup, en commençant à décimer une des importantes familles mafieuses de la ville. Et pour boucler son travail, le Punisher n'hésitera pas à distribuer ses balles jusqu'en des coins reculés de la planète.
Avis sur le comic :
Personnage très populaire chez Marvel qui, jusque dans les années 90, avait à son nom trois revues mensuelles, le Punisher vit son intérêt auprès du lectorat décliner vers le milieu de cette même décennie, avant de disparaître complètement. Il y eut bien, après son suicide, une tentative de le faire revenir sous forme spectrale à la fin du siècle dernier avec The Punisher : Purgatory, mais avec une très pauvre réception du public.
La vraie resurrection se fit avec le renouvellement de la série par Garth Ennis, qui avait déjà écrit Punisher kills the Marvel universe en 1995. Refaisant équipe avec Steve Dillon comme c'était déjà le cas sur Hellblazer et la série à succès Preacher, Ennis efface la mort de Castle et le ramène à ses origines de justicier solitaire tout en le réinventant à sa façon.
Alors que Frank Castle emménage en ville et y reste le temps de ses premières attaques, Ennis attache son personnage à des histoires qui restent encore terre à terre, frôlant l'enquète policière quand on suit en parallèle les agents maladroits chargés de traquer le Punisher ; mais en reprenant le mythe du personnage à zéro le lecteur a encore du mal à se situer. Certaines des astuces du héros pour tuer sans trop de dégâts prennent place sur l'action difficile à rendre compte sur le papier et la violence certainement restreinte par Marvel, mais cela reste crédible dans la mesure où un justicier capable de se débarasser de centaines de criminels en une soirée est crédible, jusqu'à l'arrivée de quelques courts délires inopportuns. Alors que le comique venait d'abord du Punisher demeurant pince-sans-rire quand il tuait les mafieux par lots de dix, voir son voisin obèse casser ses WC ou servir à étouffer un méchant est en trop grand décalage pour donner un ton précis au comic, et pour savoir jusqu'à quel point il faut le prendre au sérieux ou non.
La question des imitateurs du justicier est posée avec amusement, et certaines autres élucubrations d'Ennis fonctionnent, comme cette caricature de flic pleurnichard ou cette mafieuse démembrée, mais laissent encore le lecteur en déséquilibre à la fin du volume Un monde sans pitié.
C'est à partir de L'île des damnés qu'une amélioration en progression constante commence à se faire sentir. Le personnage surréel du Russe revient, mais comme pour le style d'Ennis, on retrouve les mêmes mais en mieux : le délire plus poussé est également davantage maîtrisé, et donc paraît plus assumé pour que le lecteur accepte les coups de folie sans le moindre souci. Le Punisher, toujours si froid mais plus drôle grâce aux situations où on le place ou les idiots qui l'entourent, voyage partout où il peut régler des problèmes en déchargeant ses armes, et selon les décors il lui arrive de tuer en conséquence en se servant par exemple de l'aide d'un boa au milieu de la jungle pour une économie de balles qui apporte aussi de la variété.
Quand Ennis ancre son récit dans le réel, c'est pour s'appuyer sur des questions qu'on doit venir à se poser au cours d'une escapade sanglante avec le Punisher, concernant la limite entre le bien et le mal, entre la représentation de la loi et la justice pure. Ces épisodes plus graves fonctionnent, tant que l'on fait allusion à des valeurs, plutôt que des faits concrets comme l'auteur a essayé de le faire en emmennant son personnage à Belfast où les civils se battent entre clans. Alors que quelques numéros auparavant les FARC étaient utilisés pour le massacre, Ennis essaye là de nous placer subitement dans un contexte qu'il est obligé de résumer entièrement, tout cela simplement pour une aventure d'une vingtaine de pages où la tuerie est toujours là mais placée là où nous ne sommes pas concernés.
Quoiqu'il advienne, toutes les interrogations adressées à Castle le laissent impassible, pour demeurer un personnage à la moralité douteuse. Ainsi, à des numéros aux engagements politiques où le Punisher tue en masse de toute façon, les défouloirs scénaristiques avec lesquels Garth Ennis alterne seront préférables à la lecture.
Quoiqu'il advienne, toutes les interrogations adressées à Castle le laissent impassible, pour demeurer un personnage à la moralité douteuse. Ainsi, à des numéros aux engagements politiques où le Punisher tue en masse de toute façon, les défouloirs scénaristiques avec lesquels Garth Ennis alterne seront préférables à la lecture.
Malgré l'atmosphère proche du polar à la frontière du réel, lors des détours les plus délurés de la quète de Castle, il arrive que le reste de l'univers Marvel de plein pied dans le fantastique se placent au milieu de combat contre des mutilateurs nains et un calamar géant. Que ce soit Wolverine, DareDevil ou Spiderman qui vienne s'ajouter à une histoire déjà brutalement détraquée, c'est toujours le Punisher qui est mis en avant, sous la protection d'Ennis qui en fait voir de toutes les couleurs à ses adversaires.
Au fil des aventures une plus grande liberté d'expression de la violence et de la vilenie se fait sentir, l'auteur se permettant de faire uriner de peur des ennemis du Punisher ; et il en est de même du côté des dessins. Si le premier coloriste donnait trop une impression de cartoon pour enfants aux planches de Steve Dillon, ses successeurs reprennent le ton nuancé mais sombre qui rappelle le travail de Dillon sur Hellblazer. Le passage de Darick Robertson dans la série aux côtés d'Ennis apporte de la fraîcheur par ses dessins clairs et détaillés, mais marqués de coup de crayons bruts quand il faut esquisser les effusions de sang et la crasse.
Une fois rentré dans le bon état d'esprit et la nouvelle histoire du Punisher bien engagée, même sans qu'il ait forcément des répliques qui tuent, on voit en The Punisher la trempe qu'il faut et les situations improbables qui conviennent pour mettre en place tout ce qu'on requiert d'un anti-héros inflexible aux méthodes on ne peut moins expéditives.
Le projet de Garth Ennis semble avoir été de dresser le portrait du personnage de façon de plus en plus détaillée au fur et à mesure de ses actions, pour confirmer à chaque fois, mais avec le problème pris sous un angle différent selon les cas, que le héros est réellement sans pitié ; froid et radical.
Le lecteur peut oublier à quel point le personnage est déterminé mais lui, et c'est en ça qu'il est un surhomme là où d'autres ont une bague magique ou des rayons laser, il n'oublie aucunement son but et ne faillit jamais.
Garth Ennis ayant posé les bases d'un personnage remis à neuf, il reste de quoi donner lieu à un grand nombre de péripéties véhémentes. Cependant tous les auteurs et illustrateurs ayant osé prendre la relève et qui ont jusque là délivré de bons récits qui prolongent la Punition n'ont pas à tous les coups réussi à insuffler une compréhension si limpide du récit à la première lecture, comme l'a démontré l'épisode La guerre des taxis au milieu du run d'Ennis.
Tome 1 Français paru chez Maxi-livres / Panini comics
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