dimanche 22 mai 2011

Festival de Cannes 2011 (Compte-rendu 4)


Dimanche 15 mai - Jour 2 (suite) :
Je n'avais pas compris le fonctionnement des projections du Marché : certaines se font dans des cinémas hors du Palais, et pour Yakuza warrior cela se déroulait dans un hôtel équipé de plusieurs salles de projections, ce qui m'a été difficile de trouver au départ.

Une fois le lieu repéré, je reviens le temps de m'acheter une boisson pour remplacer celle jetée le matin même au nom du dernier film de Michel Hazanavicius. De retour à l'hôtel, je vois des gens sortir de la projection précédant celle qui m'intéressait, et devant la salle se trouve un groupe d'américains parlant à l'ouvreur.
Comprenant qu'il s'agit de l'équipe du film, je jette un oeil aux prospectus présentant leur oeuvre, Love stalker, disposés sur une table basse à côté du fauteuil où j'étais. Quelqu'un du groupe veut les récupérer, je demande à en garder un ; je demande s'il est de l'équipe du film et j'apprends que la personne en question est le réalisateur. Gêné de ne pas avoir vu son film, j'explique avoir eu des places pour un autre en compétition, et me rendant compte qu'il peut mal le prendre je dis que je m'intéresse aussi à d'autres... (comment dire ça sans vexer ?) moins connus.
Voulant rassurer le cinéaste, je dis peut être aller voir sa réalisation un autre jour, seulement c'était là la seule projection. Je me rattrape en disant le voir à une potentielle sortie, ajoutant que je le verrai sur le net, ce à quoi heureusement le réalisateur répond d'aller voir le trailer sur facebook.

Tant qu'à être en présence de la personne, je demande une dédicace au cours de la discussion, "if you become famous", dis-je maladroitement et sans tellement le penser, l'autographe devenant un objet dénué de son sens. Le réalisateur fait également signer l'actrice, que je reconnais sur l'affiche malgré le fait que son visage n'y apparaisse qu'à moitié.
J'ai perdu un stylo noir qu'ils ont emporté, mais je gagne des dédicaces... l'échange aurait peut être été plus honnête si ç'avait été Tarantino, tout de même.
Quoiqu'il en soit, je pense réellement voir ce film, quand il sera disponible, pour le respect et la certaine admiration que j'ai désormais envers ces gens, qui ont pu réaliser leur oeuvre malgré les conditions d'amateurs, qui réussissent à le présenter à Cannes, et qui se déplacent pour l'occasion alors même qu'il ne s'agit que d'une unique projection dans une petite salle.
Il y a de plus désormais un aspect humain lié à ma perception de ce film qui me donne envie de le voir, pour avoir rencontré les membres de l'équipe, par ailleurs sympathiques, et pour avoir eu des dédicaces sans même avoir assisté à leur projection. C'est donc également un devoir, une marque d'honnêteté tacite envers eux, que de voir leur création.
Pour la séance de Yakuza weapon, j'apprends qu'il me faut une invitation, que l'on pouvait obtenir au marché.
J'attends tout de même, selon les conseils de l'ouvreur, l'arrivée éventuelle d'une personne de la société distribuant le film, avec quelqu'un d'autre dans le même cas que moi.
Il se trouve justement qu'une femme arrive et nous fournit des invitations, ayant simplement demandé "Are you from the festival ?", et non "are you buyers ?", après quoi nous lui avons montré nos badges.
Peu avant, je demandais au passage à l'employé de l'hôtel si l'équipe du film sera présente, ce qui selon lui est rare. Il demande si je les connais, ce à quoi je lui dit que non mais lui évoque cette nouvelle vague de gore asiatique, où tous les créateurs sont un peu liés entre eux... je n'en étais pas sûr du tout, mais après vérification depuis, l'un des réalisateurs l'a aussi été pour Meatball machine et Battlefield baseball, et l'autre a été acteur dans Versus et Tokyo gore police.


Yakuza weapon


Fiche du film :
Réalisateurs et scénaristes : Tak Sakaguchi et Yûdai Yamaguchi
Année : 2011
Genres : Action / Science-fiction
Acteurs principaux : Tak Sakaguchi, Shingo Tsurumi, Akaji Maro

Avis sur le film :
Je n'avais pu voir Naked soldier, ou même Bong of the dead, la veille, mais là je pouvais voir Yakuza weapon, qui m'intéressait déjà bien plus.
J'avais une idée de la démence de ce à quoi j'allais assister, mais on nous annonce tout de même à quoi s'attendre avant même le film, avec la courte vidéo présentant la société "Sushi typhoon", qui consiste en un plan d'un maki soigneusement préparé qui soudain explose.
Le début du film annonce aussi immédiatement la suite des évènements.
En ouverture, une définition austère de ce qu'est le yakuza, qui ne peut certainement pas être prise au sérieux en se doutant de ce qui va surgir après.
La première séquence nous présente le héros dans toute sa splendeur, tenant debout tandis que des militaires s'effondrent autour de lui en se faisant toucher par balles. Shozo, lui, reste dressé sur ses pieds, et nous fournit une information utile : "you only get hit when you're afraid to get hit". Ainsi lui est-il possible de sauter sur des mines sans crainte, tant qu'il hurle à pleins poumons "willpower !".
Le ton est donné, pour ce film qui allie action dénuée de toute raison et humour idiot, souvent scabreux. Ce dernier passe plus ou moins bien selon les cas : un ennemi qui imite une pose de combat où il est accroupi, craquant alors son pantalon et pétant, ce n'est pas drôle, malgré l'intention première acceptable. Un chef qui sort des toilettes en disant que le boucan l'a déconcentré alors qu'il déféquait, par contre, c'est déjà plus comique, mais la différence tient à peu de choses.

Il y a des passages brefs qui paraissent s'aventurer dans d'autres genres, comme des intrus totalement abscons, comme avec ce plan au ralenti sur une perruque qui vole au vent durant un combat, ou ce soutien-gorge d'une ennemie qui, curieusement, tombe après qu'elle ait été anéantie.
Pour perpétuer la tradition de Robo-geisha ou Battlefield baseball, l'humour crétin est couplé avec une violence amplifiée et basée sur de l'excentricité qui se renouvelle toujours : des chaussures-à-crampons-perceuses, ou un lance-missile dans le genou.
Etrangement, dans Yakuza weapon est inclue une histoire dramatique apparemment plus sérieuse, se basant sur des flashbacks du héros avec un ami de longue date, dont la soeur a été violée et qu'il veut venger. Il y a là une tentative honorable de vouloir approfondir l'histoire en explorant le passé du personnage principal, avec toujours des touches d'humour de temps à autres, en même temps que nous assistons à son retour dans son quartier après des années d'absence. Cependant ce tournant est trop inatendu, et certains retours en arrière perdent au premier abord le spectateur s'attendant à un spectacle totalement décérébré du côté de son scénario.


Le retour au délire complet ne tarde heureusement pas, avec l'équipement bionique du personnage principal en sus.
Les effets spéciaux numériques sont très médiocres, le sang est clairement faux, les explosions aussi, et les astuces utilisées pour installer une illusion sont visibles : le bâton de TNT en CGI quitte l'espace visible avant de pouvoir exploser, hors-champ.
Les combats quant à eux ne sont pas mauvais mais trop banals, quoiqu'un renouvellement s'effectue avec un plan-séquence phénoménal en moitié de film qui permet de rendre impressionnant ce qui était devenu une simple répétition de coups de pieds, de poings, et de tirs à la sulfateuse.
L'autre idée très marquante qui arrive en seconde partie du long-métrage est cette femme littéralement objet, transformée en une arme obscène dont tous les orifices et toutes les positions sont mobilisées pour tirer des coups, et toutes les possibilités sont exploitées à partir de cette même idée de départ pour en obtenir le maximum.


La fin, jusqu'au-boutiste et complètement absurde, s'inscrit dans une certaine logique puisqu'elle donne en quelque sorte la définition détournée de "yakuza" d'après les réalisateurs, comme en réponse à celle plus traditionnelle du début, les deux se rejoignant dans une certaine mesure, puisque pour les géniteurs du film, la figure Japonaise qu'ils évoquent dans le titre est caractérisée par une détermination et un courage sans faille. Le héros se montre digne de son statut de yakuza, quitte à se tuer en emportant d'autres personnes avec lui dans une explosion titanesque, cela afin de déjouer les plans d'un fou qui a mis une ogive nucléaire à son entrejambe.

Bande-annonce VOST :



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A noter que c'est la première séance du Marché du film à laquelle j'ai assisté, et que j'ai été surpris par les déplacements incessants des acheteurs, rentrant ou sortant n'importe quand, attirés à l'extérieur par un appel de portable ou peut être en ayant simplement marre de voir un long-métrage où on troue la tête de quelqu'un avec une chaussure à crampons.
A la sortie, je demande à divers personnes, dont l'ouvreur, qui n'est plus le même qu'auparavant, si le réalisateur est présent. Il semblerait que non, et même la femme ayant donné les invitations a disparu ; l'ouvreur me dit qu'en général ils ne restent pas longtemps. Dommage, j'aurais aimé rencontrer les géniteurs de la folie que je venais de voir.
A la sortie du cinéma, je revois Samy Naceri, plus calme, prêt à poser avec les gens autour de lui sans s'énerver. Le voir deux fois en deux jours, c'est beaucoup trop pour être un hasard ; mécontent de ne pas pouvoir se présenter à Cannes pour un film, il devait traîner dans les rues à chercher le regard de ceux l'appréciant.
Mes acolytes l'ont revu le lendemain aussi, et à en croire un journal que j'ai lu depuis mon retour, l'acteur semblait réellement doué d'ubiquité durant le festival.

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