jeudi 3 février 2011

Another year


Fiche du film :
Réalisateur et scénariste : Mike Leigh
Année : 2010
Genre : Comédie dramatique
Acteurs principaux : Jim Broadbent, Ruth Sheen, Lesley Manville
Résumé : Tom et sa femme Gerri sont un couple âgé mais toujours actif, profitant de chaque instant de leur vie ensemble. Leurs proches ne sont pas tous aussi comblés, et auraient de quoi envier leur bien-être.

Avis sur le film :
Le décès de son producteur attitré Simon Channing-Williams, remplacé ici par Georgina Lowe, poussa Mike Leigh à se pencher plus en avant sur le thème de la vieillesse qui le touche désormais plus personnellement du haut de ses 66 ans. Bien qu'il l'ait déjà traité par le passé, dans Another year il le place au premier plan, accompagné d'acteurs tels que Jim Broadbent et Lesley Manville qui l'ont déjà maintes fois croisé durant sa carrière et qui ont eux aussi, depuis, atteint un âge avancé.
Comme à son habitude, Leigh n'avait pas son scénario ni ses personnages alors qu'il avait choisi ses acteurs, travaillant avec eux à écrire le film à partir d'improvisations durant les répétitions.


A suivre pendant plus de deux heures la vie d'un couple de sexagénaires de façon fidèle à la banalité de la réalité, Another year suscite peu d'attentes, et c'est justement ce qui est nécessaire pour accepter de le suivre comme un nouveau jour tout à fait ordinaire, avec ses passages à vide mais également ses quelques surprises alors que le chemin aurait pu être tout tracé. Là où d'autres films à l'intrigue épurée ennuyent, la dernière oeuvre de Mike Leigh apporte une dose d'humour, non pas digne d'une comédie, tout juste à la hauteur de blagues spontanées lancées au cours de discussions réelles, mais qui font au moins sourire et que l'on accepte volontiers grâce à la bonhomie des personnages. Tom et Gerri en particulier, qui sont des personnes que l'on admire pour leur amabilité permanente, à se demander si un comportement pareil peut se retrouver chez des individus existants bel et bien. Le film ne tombe pas dans la caricature pour autant, à l'opposé du personnage de Flanders dans Les Simpsons, et les acteurs font sentir qu'il existe entre eux un lien fort qui les fait apprécier la vie telle qu'elle est, sans aucun stress ni but précis, bercés par une infinie tranquilité qui leur procure un bien-être qu'ils partagent avec plaisir en accueillant leurs amis chez eux.


Les personnages sont suivis au cours de quatre saisons, mais à chaque fois résumées en un seul évènement en apparence banal et qui, pourtant, suffit à concentrer tout ce qu'il faut savoir. Nombreux sont les individus malheureux qui gravitent autour de Tom et Gerri ; parmi eux Mary la cinquantenaire qui désespère de trouver l'amour et qui pense que l'achat d'un véhicule d'occasion lui apportera un changement tant attendu dans sa vie. Etant la seule invitée récurrente, puisqu'elle s'impose toujours à l'improviste, cette femme est le sujet d'un apitoiement croissant en même temps que le film nous fait part de son évolution, qui tend essentiellement au négatif. Mary pourrait envisager de sortir avec Ken -ce pauvre homme délaissé, se lamentant lorsqu'il boit de trop sur le bon vieux temps et sur feu sa femme - mais elle préfère Joe, le fils de son couple d'amis. De quoi donner lieu à des situations perturbantes pour le spectateur qui grince des dents car saisit tout ce qui se trame. La réalisation n'est pas pour autant caricaturale pour faciliter la compréhension, si ce n'est légèrement en dernière partie, celle correspondant à l'hiver où les teintes tirent exagèrement vers le bleu glacial pour insister sur le changement radical de ton. En effet, la quatrième saison présentée s'ouvre sur un enterrement et brise avec le reste du long-métrage en passant à une atmosphère beaucoup plus tendue, où même Tom et Gerri éclipsent leur image trop parfaite en ne dissimulant plus leur agacement concernant Mary.


Mike Leigh en dit peu par son scénario, et ne se positionne pas réellement par rapport à ses personnages, jouant souvent sur les non-dits, et c'est justement ce qui interroge moralement le spectateur sur la façon dont il perçoit le comportement de chacun. Si les raisons des agissements de chacun d'eux sont compréhensibles dans un camp comme dans l'autre, le discernement d'un spectateur ou d'un autre peut faire de Tom et Gerri des hypocrites ou un couple bienveillant et de Mary une victime ou une plaie.
Au contraire la caméra est plus expressive, insistant subtilement sur ce qu'il faut, notamment pour créer une certaine empathie avec les personnages, indispensable dans le cas présent afin de suivre et d'apprécier le film de bout en bout.
Another year ne présente, comme son titre l'indique, qu'une année de plus, certainement pas plus passionnante qu'une autre mais pas moins non plus. Une année qui passe sans que les personnages n'aient atteint un point d'arrivée, qui ne pourrait être nous être présenté qu'au cours d'une autre année, ce qui n'est toutefois pas nécessaire puisque le film se quitte sans regrets comme l'on partirait d'une soirée tout juste sympathique, sans besoin d'en voir plus ni désir de revenir en arrière.

Bande-annonce VOST :

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