En avant-première :
Fiche du film :
Réalisateurs : Robert Rodriguez et Ethan Maniquis
Scénaristes : Robert Rodriguez et Alvaro Rodriguez
Année : 2010
Genre : Action
Acteurs principaux : Danny Trejo, Jessica Alba, Robert De Niro
Résumé : Le légendaire agent de police Machete perd tout quand il est trahi par un collègue et que sa famille se fait tuer devant ses yeux. Désormais à la rue, survivant comme il peut, il est obligé d'accepter un travail risqué qu'on lui propose : tuer le sénateur McLaughlin.
Introduction :
Ce qui devait devenir le projet Grindhouse trouva ses origines dans l'esprit de Robert Rodriguez avant qu'il ne réalise Sin city, à partir d'idées autour d'un film de zombies qui, une fois assemblées, ne pouvaient que constituer un moyen-métrage d'une heure, et éventuellement un double-programme où se succèderait une autre histoire. Cette idée laissée de côté refit surface lorsque, de visite chez son collègue et ami Quentin Tarantino, Rodriguez remarqua que tous deux possédaient le même poster pour la projection en duo de Dragstrip girl et Rock all night, ce qui fit réémerger en eux des souvenirs de cette époque où le cinéma d'exploitation envahissait les salles de quartiers par ses pellicules abîmées et ses bandes-annonces pour des productions aussi grotesques les unes que les autres.
C'est ainsi que naquit Grindhouse, bannière portant le nom de ces salles de cinéma disparues et sous laquelle se réunirent un groupe de compagnons cinéastes comprenant également Eli Roth, Edgar Wright et Rob Zombie qui participèrent aux bandes-annonces de l'entracte, pour livrer au public l'ambiance Grindhouse au delà des séances privées que Tarantino se fait avec ses amis, jusqu'aux grandes salles de cinéma qui, le temps d'une séance, régressent sciemment vers des temps plus modestes mais à l'ambiance unique. Si ce n'est que, pour l'occasion, Tarantino et Rodriguez cherchèrent à ce que la programmation soit à la hauteur de la folie des affiches et des bandes-annonces qui la promouvait.
Avis sur le film :
Machete ne devait être qu'une fausse bande-annonce parmi celles placées au milieu du programme Grindhouse, mais comme l'avait prédit Quentin Tarantino, le public exigerait qu'elles deviennent de vrais films. Après plusieurs années d'hésitation quant à savoir si "la Machette" se fraierait ou non un chemin vers les salles de cinéma qui réserveraient une heure et demie de projection rien que pour lui, la concrétisation du projet fut annoncée en même temps que le début du tournage en 2009.
Les origines du film remontent pourtant avant Grindhouse, qui n'a fait qu'annoncer le projet grâce à l'opportunité présentée par la réalisation d'une bande-annonce, puisque c'est lorsque Danny Trejo travailla avec Robert Rodriguez sur Desperado que ce dernier vit en l'acteur la possibilité de créer un héros d'une série de films latinos, comme un équivalent Mexicain de A toute épreuve et The killer.
Ce n'est qu'avec la révélation publique du scénario écrit depuis 1993 que le projet se met en marche, l'occasion pour Danny Trejo, "gueule" pourtant déjà connue du cinéma par ses rôles de méchants ou d'hommes de mains dans une centaine de films, d'avoir pour la première fois un rôle principal.
Le contexte de Machete s'appuye sur un problème toujours d'actualité et qui a connu des remous récemment : les immigrés clandestins de plus en plus nombreux qui outrepassent la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis. Cependant Robert Rodriguez ne réalise pas un film engagé, malgré des piques destinées aux partisans d'une politique rude, et même avec ses recherches sur le travail illégal soutenu par des membres du gouvernement et sa représentation des activités clandestines connues de l'homme de la rue, tout n'est fait que pour servir de toile de fond à l'histoire et mettre en avant Machete comme le badass ultime. Que sa famille ou son coéquipier soient tués n'est pas tant dramatique, mais ne sert qu'à donner une raison au héros de vouloir se venger sauvagement et le valoriser de la même façon que Charles Bronson dans la saga Death wish.
Du reste, Danny Trejo a déjà de quoi s'imposer par sa seule présence, son visage marqué par des aléas violents de sa vie et les longs couteaux qu'il arbore à sa veste.
L'acteur est le représentant de l'aspect brutal et de la culture Mexicaine dont le réalisateur est adepte, plaçant des allusions à ce pays sans se faire d'illusions sur sa pauvreté, néanmoins sans réelle moquerie mais plutôt avec la fierté d'un peuple aux moyens modestes. C'est dans la même logique qu'est choisi le reste du casting, rassemblant des acteurs hispaniques d'hier et d'aujourd'hui face à des comédiens blancs dans des rôles de méchants, piochés parmi des personnalités cultes ou au contraire has-been, qui se prêtent au jeu pour abîmer ou détruire leurs images en incarnant des personnages qui leur vont pourtant si bien.
Robert Rodriguez sait choisir ses collaborateurs, selon qu'ils conviennent à leurs rôles comme Tom Savini en méchant et Lindsay Lohan en fille riche pourrie-gâtée qui se débauche, ou qu'ils soient en total décalage comme Cheech Marin en prètre et Steven Seagal en surpoids armé d'un katana, le principal est de faire rire d'une façon ou d'une autre. Quoi qu'il en soit, la combinaison effectuée avec chacun apporte des répliques hilarantes, des questionnements idiots, et une critique sévère de la société qui ne se prend à aucun moment au sérieux.
C'est par leur ridicule que les ennemis de la justice en deviennent méchants et, bien qu'au nombre de cinq, Machete vient les abattre un à un sans donner l'impression d'un scénario surchargé par ses promesses, arrivant aussi à placer de courtes mais superbes reprises d'éléments du cinéma Grindhouse comme les catcheurs masqués et la nunsploitation, le tout parfaitement imbriqué dans une histoire qui a l'air simple mais qui se démène pour tout ordonner sans avoir l'air de vouloir trop en faire. L'absurdité de ces films d'antan se retrouve même à coïncider avec des aberrations de la vie moderne devenues drôles et acceptables une fois Danny Trejo mis en scène, capable de faire approuver, en même temps que rire, l'utilisation des low-riders une fois qu'il y est placé au volant en brandissant sa machette. Cette arme favorite, préférée aux pistolets, est utilisée avec une diversité jamais lassante et toujours estomaquante, et est devenue une emblème d'un retour aux plaisirs simples, mais avec une abondance exorbitante de violence qui va toujours plus loin grâce à des coups supplémentaires inutiles mais admirables ; et en dehors de cela un usage létal d'objets se trouvant à chaque lieu visité qui, à la sauvagerie déjà prodigieuse, ajoutent des effets comiques qui achèvent de couper le souffle.
Avec cette tuerie dans tous les sens du terme, Robert Rodriguez a, jusqu'à sa prochaine réalisation du moins, atteint le sommet de ce qu'il savait déjà faire, car il y a encore la possibilité de faire mieux et surtout de créer un crescendo où actes démentiellement saugrenues et démembrements barbares mèneraient à un final qui cette fois surpasserait le reste par un réel coup d'éclat. Il a néanmoins bâti un nouveau personnage terriblement badass que méritait Danny Trejo pour couronner sa carrière cinématographique, et a étonnamment réussi à prolonger l'action et la frénésie sans temps morts qui aurait pu ne pas fonctionner au delà de la bande-annonce qu'il avait monté.
Réplique culte :
"You just fucked with the wrong Mexican" - Michael Booth
Fausse bande-annonce VO :
Bande-annonce VO :